NEOLITHIQUE. Quand le savoir-faire de cultivateurs-éleveurs subjugue les chasseurs-cueilleurs et les conquiert partout dans le Monde…

Quand le savoir-faire de cultivateurs-éleveurs subjugue les chasseurs-cueilleurs et les conquiert partout dans le Monde…

Au Néolithique (dès 10 000 ans avant notre ère), l'histoire de l'Homme devient l'histoire de la domination du milieu, de la Nature, en même temps que l'histoire de la domination des autres hommes. Pour dominer les autres hommes chasseurs-cueilleurs, l'homme cultivateur-éleveur en migration vers des zones nouvelles, bénéficie d'un « pouvoir » d'émerveillement lorsqu'il est aux prises avec des autochtones chasseurs-cueilleurs d'une zone dans laquelle il migre. Il faut imaginer par exemple trois-quatre hommes-bergers, approchant d'autochtones chasseurs-cueilleurs, dans le sillage desquels trois-quatre bergers tout un troupeau de moutons, de chèvres, suit leur pas, au mètre près. L'autochtone chasseur-cueilleur n'a jamais vu cela de ses propres yeux ! L'Homme parvient à faire de certains animaux ce qu'il en veut ? Il y a de quoi subjuguer l' « Autre », cet autre Homme étant chasseur-cueilleur : chassant les animaux, cueillant certaines baies, certains fruits, arrachant certains légumes, voilà tout...

Cet ascendant psychologique du cultivateur-éleveur sur le chasseur-cueilleur permet alors bien des possibilités de conversion à ses propres pratiques, techniques, à son propre savoir-faire, à son propre savoir-vivre qui accompagne de sédentarisation, de création de village/ville, de fixation durable en village/ville, cette « force inouïe sur la Nature » qu’il semble avoir, aux yeux des chasseurs-cueilleurs…

Récoltes, semences, animaux domestiqués, biens matériels et outils sont transportés lors des migrations de ces cultivateurs-éleveurs. Tout se réalise d’abord de proche en proche : à l’intérieur de la zone géographique du Levant (Syrie, Liban, Jordanie, Mésopotamie, Palestine, Israël, Anatolie, Egypte). Puis en-dehors du Levant, ces cultivateurs-éleveurs apportent un « bagage » colossal aux populations autochtones rencontrées. L’aventure de la migration vers une contrée voisine est tentée uniquement par des équipées de cultivateurs-éleveurs lorsque les populations alentours de chasseurs-cueilleurs sont moins nombreuses qu’eux.

Une nouvelle conception de la vie/survie, est alors transmise à ces chasseurs-cueilleurs qui, par logique, s’essaient à ce nouveau rôle de cultivateur-éleveur d’abord avec tatônnements puis avec certitudes lorsque les fruits du travail accompli arrivent à maturité.

La quête fondamentale vers la « grande propriété » pousse à migrer

La question de la « propriété » demeure. Un chasseur-cueilleur local emprunte le savoir-faire et l’outillage d’un migrant cultivateur-éleveur en tant que « locataire ». Locataire des terres nouvellement mises en culture, locataire du matériel. Redevable du savoir-faire acquis. Ce qui met cet ancien chasseur-cueilleur devenu cultivateur-éleveur, à la merci du grand cultivateur-éleveur lui ayant tout appris. Il faut imaginer qu’une famille de cultivateurs, ou une famille d’éleveurs, puisse ne réaliser qu’une prise de risque de migration vers des terres nouvelles voisines, en deux-trois générations maximum.

La question de la propriété de terres est-elle facteur de diffusion de l’élevage et la question de la propriété de terroirs est-elle facteur de diffusion de l’agriculture ? En ce qui concerne le « foyer néolithique » du Levant, la question est vite réglée : véritable « nasse » en son sud (plus au sud c’est le désert !), et véritable tributaire des crues/décrues des deux fleuves Euphrate et Tigre en son Est, le Levant devient rapidement, par accroissement des populations lié à l’invention de l’agriculture et de l’élevage, un goulet d’étranglement de ces populations amassés en villes et il devient primordial pour les plus petits des « propriétaires terriens » de migrer.

Ces petits propriétaires terriens migrent alors vers des aires géographiques voisines, et deviennent à leur tour « grands propriétaires terriens » dans ces zones limitrophes du « foyer levantin ». Par exemple un petit propriétaire terrien levantin devient, après sa migration totale (c’est-à-dire en famille voire en petite unité de plusieurs familles cultivatrices, transportant outillages agricoles, disposant d’un savoir-faire agraire) vers l’Anatolie occidentale (Ouest de la Turquie actuelle), un grand propriétaire locale, une élite sociale locale, un notable local. Et il s’avère que ce statut enfin acquis, celui-ci et toute sa famille s’arrête là pour de bon. Se fixant, et générant une cohorte nouvelle de petits cultivateurs qui eux-mêmes, à leur tour, voudront s’élever socialement en migrant un beau jour vers par exemple l’Ouest dans les Balkans…

La question des terres cultivées, et des terres mises en pâtures devient l’objet d’élévation sociale, élévation jusqu’au rang d’élite locale. Celui qui dispose de terres doit en effet y faire prouver son savoir-faire technique et agricole.

La quête sociale et sociétale vers des terres et terroirs en suffisance, a permis la diffusion de la langue indo-européenne, et aussi de l’ensemble « savoir-faire agraire, savoir-faire en élevage », depuis l’Anatolie sud-orientale (le Sud-Est de la Turquie actuelle) vers les Balkans, puis plus tard vers l’Europe danubienne jusqu’à l’Océan Atlantique, la Manche et la mer du Nord…

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